Annecy-le-Vieux
Introduction 1 : La terre et les hommes
2 : De la préhistoire à la naissance d'Annecy-le-Vieux
3 : La paroisse et ses édifices religieux
4 : Un moyen-âge obscur et difficile
5 : 17ème et 18ème siècle : une image qui se précise et se durcit
6 : La Révolution et l'Empire (1792-1815)
7 : La Restauration Sarde (1815-1860)
8 : De l'Annexion à l'urbanistion
Annexe 1 : La vigne et le vin Annexe 2 : La famille de Menthon de la Balme au château de la Cour
Autres annexes |
1 : La terre et les hommes - 1.3 : Annecy-le-Vieux et le Fier
Ce torrent qui borde Annecy-le-Vieux par un arc de cercle de plus de douze kilomètres était appelé autrefois le Cier (en latin Cerus) ; ce nom semble avoir une origine très ancienne peut-être préceltique[1]. L’appellation Fier, plus « médiatique » s’est imposée vers le milieu du 19ème siècle.
Après avoir divagué dans la plaine d’Alex (ancien lac), le Fier reprend vigueur à Dingy-Saint-Clair ; la pente est de 1% jusqu’à Brogny où son cours se ralentit avec une pente de 0,7% jusqu’à Cran.
Entamant franchement le calcaire et la molasse, dans lesquels il s’encaisse, il est à l’origine de nombreux reliefs aux noms évocateurs : les Etroits, la Côte Moulin, la Combadieu, les Côtes du Fier, la Pente Forte, la Combe Enverse ; « l’envers » est en Savoie un flanc de vallée exposé au nord, par opposition à « l’endroit ». A peu de distance, on trouve les points les plus hauts de la colline d’Annecy-le-Vieux : le Crêt de la Varde (538m) et la Quéchat (565m).
Ses écarts de débit sont considérables : au Pont de Brogny, 900m3 par seconde lors des crues dites « centennales » (une par siècle) et 600m3 lors des crues « ordinaires » (une par décade), pour tomber parfois à 800 litres par seconde ; les périodes de basses eaux se situent en juillet-août et dans l’hiver.
Ce fleuve capricieux est une véritable frontière naturelle que l’homme dû organiser pour le franchir dès la plus haute antiquité. Le secteur proche du Pont de Brogny, qui unit le hameau du Petit Brogny (Annecy-le-Vieux) à celui de Brogny (sur la commune de Pringy) retient particulièrement l’attention. Point de passage de la voie romaine de Boutae à Genève, siège d’un péage au Moyen-âge, il a joué le rôle de frontière sanitaire d’Annecy, avec la présence d’une « maladière » où l’on accueillait les lépreux. L’existence d’un pont de pierre est attestée en 1578, époque à laquelle la plupart des ponts étaient en bois. Comme le pont de Dingy, qui avait aussi sa « maladière », le pont de Brogny, avant-poste militaire d’Annecy, a été le siège de plusieurs combats et embuscades au cours de l’histoire.
Entre les deux, des passerelles en bois, appelées « planchers », existaient encore au 19ème siècle. Elles sont devenues des ponts, sauf celle du Nanoir, donnant accès à Dingy, qui a disparu.
La vallée du Fier dans sa partie bordant Annecy-le-Vieux n’a pas attiré les établissements humains, à l’exception du site gallo-romain des Illettes, déserté ensuite, ce qui a permis de réaliser de nos jours des fouilles intéressantes.
Mais cet énorme réservoir de force motrice ne pouvait manquer d’attirer les esprits entreprenants. Les anciens lieux-dits la Côte-Moulin et Vire-Moulin, proche du Fier sont à noter en ce domaine. Trois sites ont été utilisés à la fin du 18ème siècle et au 19ème siècle, près des ponts d’Onnex, de la Bornale et de Brogny. Mais avant de faire fonctionner un établissement au fil de l’eau (appelé autrefois « artifice »), il fallait réunir bien des conditions : existence d’une voie d’accès, construction d’un barrage, creusement d’un long canal d’amenée des eaux, parfois en souterrain, obligation de ne pas gêner les établissements préexistants, le tout compliqué par de lourdes formalités administratives.
Quand ces conditions étaient remplies, on pouvait espérer installer un « artifice » à usages multiples : moulin, scierie, pressoir d’huile, battoir à chanvre, martinet de forge. Plusieurs tentatives ont eu lieu au 19ème siècle ; mais les premières installations, avec barrages faits de pieux de sapins, de pierres et de terre, résistaient mal aux crues. Il a fallu attendre les barrages en maçonnerie pour réaliser une implantation durable[2].
Les écoliers de 1892 notaient dans leur cahier que le Fier véhiculait des paillettes d’or ; nous n’avons trouvé aucune confirmation du fait[3]. Les riverains du Fier s’intéressaient plus aux troncs des sapins laissés sur leurs terres par les grandes crues et qu’ils pouvaient débiter pour leur usage personnel.
Enfin, les eaux froides du Fier étaient appréciées des baigneurs au début du 20ème siècle : une navette les transportait d’Annecy au Pont de Brogny. Naguère, des jeunes d’Annecy-le-Vieux n’hésitaient à plonger dans les trous d’eau du torrent pour y attraper des truites à la main ; on y venait de Frontenex pour faire les « grandes lessives ».
[1] Cf. le Sierroz, qui se jette dans le lac du Bourget et qui s’appelait autrefois le Ciers. La Fillière, affluent de droite du Fier venu de Thorens, s’appelait autrefois la Cilière.
[2] Archives de la Minoterie Cléchet.
[3] La présence et l’exploitation d’or dans les eaux du Chéran est attestée du 18ème siècle à nos jours.
Date de création : 26/02/2010 @ 15:56 |